Première exposition chez Art : Concept, et Nina Childress signe son histoire du désir en peinture. Ici des garçons et des filles aux cheveux longs seventies, rockeurs et groupies tous unis par le sexe. Unis, mais pas égaux, ni en nombre ni en taille, avec deux grosses têtes de deux Pamela encore adolescentes — Nina, on le sait, travaille le redoublement — : Pamela A (Anderson) bien avant les années Alerte à Malibu, et
sa version plus confidentielle, doublure blondinette, Pamela B (Des Barres). Deux girls next door, des filles sympas, col claudine sur pull rose, pull bleu roi, la raie au milieu pour des cheveux qui encadrent, comme des rideaux, le visage qui sourit, les yeux plus grands que réel. Ces yeux dimensionnés parfois jusqu’à la caricature, elles les ont en commun avec les garçons qu’elles dominent de leur 2m60 sur 2m10. Parmi ces types aux belles tignasses avec strass et paillettes, il y a ceux qu’elles épouseront des années plus tard : Husband (Tommy) Lee, batteur superstar de Mötley Crüe, et sa version light Husband (Michael) Des Barres chanteur du groupe Silverhead, deux jeunes et jolis bad boys aux allures de filles, yeux jaunes et tétons exhibés.
Nina Childress peint ce moment encore vierge, où les unes rêvent aux autres dans une relation unisexe de miroir et de projection. Et c’est là le sujet de sa peinture : un jeu de miroir qu’elle travaille sans ironie sur des toiles argentées, tissus holographiques ; histoire de « réfléchir » un peu cette peinture figurative qui se vautre ailleurs dans des fantasmes hyperréalistes. Vous voulez du réalisme ? coller au réel ? Accessoire ! répond l’artiste qui accroche littéralement strass, cravate, lacet de chemise et foulard.
La figuration chez Nina est un art optique qui ne cherche pas la sidération du « tellement bien fait » mais la mise au point déceptive du regard : une peinture qui s’éclaire dans l’obscurité, s’aplatit à la lumière — le Prince phosphorescent caché dans la toute dernière salle — ; ou le portrait de quatre rockeurs bubble gum sur tissu holographique qui vibre et change selon nos déplacements. Voilà une peinture
d’illusions qui joue sur des questions de rythme à tous les niveaux.read more
Nina Childress reçoit Florence Grivel dans son atelier et revient avec elle sur les évènements marquants de sa vie artistique, professionnelle et personnelle. A retrouver en cinq épisodes sur RTS 2 podcast, pour l’émission « La vie à peu près » :
C’est tout plein d’hardiesse que j’ai vu la MECA
Honteusement privé de son phonème nique
Vu l’édifice en toc d’une archi très caca
Qu’on aborde cependant sans aucune panique
Tout en haut m’attendait l’expo de la chère Nina
Ses exploits itérés de couvreuse de cimaises
Même lorsqu’elles surplombent l’ersatz d’une marina
Baignant sur la Garonne avec toutes ses aises
Pour appuyer l’effet de plus de véhémence
Y’a pas un mur de droit et les angles s’évasent
Posant d’emblée l’enjeu d’une telle performance
Surtout lorsque la canicule met ses pieds dans la vaseread more
Le jeudi 23 juin 2022, Laure Adler recevait Nina Childress à l’occasion de sa rétrospective au FRAC MECA Body Body. Elles reviennent ensemble sur son parcours et son autobiographie par Fabienne Radi.
par Laurent Goumarre, paru dans artpress 495/ janvier 2022
Une chose que j’ai apprise en regardant la peinture de Nina Childress ? voir double. Que voir, c’était toujours revoir, que peindre c’était repeindre, que ça marchait par deux, comme le titre de sa rétrospective Body Body, comme son catalogue, double, retenu par un gros élastique vert : en 1, son autobiographie par Fabienne Radi ; en 2, le catalogue raisonné de ses 1081 peintures depuis 1980 exactement. Être exact, c’est bien le moins qu’on puisse faire pour cette peintre qui liste tout, répertorie, numérote ses peintures, ses expositions, ses articles, ses amants… Préférer systématiquement la chronologie à la théorie ? ça me va. read more
2 émissions présentées par Arnaud Laporte, le 10 novembre 2020.
AFFAIRES CULTURELLES, présentée par Arnaud Laporte, durée 55 min.
L’artiste Nina Childress est au micro d’Arnaud Laporte. Influences, processus de création et imaginaires : Nina Childress nous emmène dans les coulisses d’une peinture inclassable.
La dizaine de peintures qu’elle présenta dans l’exposition du Palais de Tokyo Futur, ancien, fugitif – Une scène françaisecet hiver rappela à ceux qui l’auraient oubliée l’existence de cette artiste dont la “présence sur la scène artistique est à la fois établie et relativement discrète”, comme l’écrit fort justement à son sujet The Art Newspaper. Discrète, Nina Childress, 58 ans, l’est en effet un peu plus que lorsqu’elle était la chanteuse du groupe punk Lucrate Milk à Paris au début des années 80, ou quand elle traînait à New York avec la galeriste Pat Hearn, et c’est maintenant dans son atelier des Lilas qu’elle passe le plus clair de son temps à travailler sans cesse la peinture. Mais certaines œuvres prennent toute leur dimension avec le temps, et la discrétion n’est plus de mise pour celle-ci qui révèle aujourd’hui sa singularité.read more
À propos de la série de portraits de Britt Ekland peints par Nina Childress
Comment dire ? Il y a des visages qui font tout de suite penser à de la matière. Prenez Clint Eastwood par exemple. Ou Samuel Beckett. Le mot minéralité leur colle à la peau. Comme s’ils avaient été taillés dans le granit dès le départ plutôt que sortis du ventre de leur mère. Le visage de Michel Simon, lui, fait songer à de la pâte à crêpe. On a envie d’enfiler une béquille sous chacune de ses joues comme dans les tableaux de Dali.read more
A Paris, l’artiste Américaine Nina Childress expose ses corps féminins maladroits et sensuels, à contre-courant des fantasmes masculins.
Ôter un pull ou une robe moulante, voire les deux à la fois, conduit le corps à inventer des mouvements de hanches inédits, insistants et frénétiques qui ne font finalement qu’accroître la panique qui vous saisit quand il vous faut bien admettre que, la tête engoncée dans cette inextricable boule de fringues, le souffle court, les bras ballants, vous n’avez plus prise sur rien, ni sur votre image ni sur votre dignité. Ce moment-là, où les atours encombrent plus qu’ils ne parent, où la nudité elle-même se fait hésitante, entre érotisme et balourdise, on ne l’avait jamais vu fixé dans un tableau avant que Nina Childress ne dépeigne ce modèle féminin ainsi embarrassé.read more
Quels ingrédients s’agrègent dans ce curieux titre d’exposition, Le Requiem du string ?
Nina Childress, qui se déclare allergique à toute religion, réagit à la grande chapelle du Genêteil qui l’oppresse comme un mausolée. Alliant salve comique et catharsis, elle choisit d’associer un joli terme chrétien à un anglicisme évocateur, aux connotations laïques et fessues. Lorsque la prière s’adresse à un sous-vêtement, c’est tout de suite moins grave, plus drôle. L’exposition se laisse présager comme un cocasse service funèbre, où le string qui nous a tristement quittés laisse les corps plus libres. Sur le carton d’invitation, Nina Childress trace de son écriture souple le mot Requiem avec un gros Q. La messe est dite.read more
Passée par le punk au début des années 80, la peintre franco- américaine présente à Sète une vingtaine de toiles récentes, toujours dans une gamme de couleurs saturées. Rencontre par Clémentine Gallot envoyée spéciale à Sète.
Le pas de la porte ripoliné en rose fluo et le mur entièrement drapé d’un rideau émeraude annoncent la couleur. Cette entrée des artistes, en forme de haie d’honneur tapageuse, aimante le regard vers les perspectives fluorescentes du parcours qui s’annonce dans les anciens entrepôts frigorifiques du Centre régional d’art contemporain (Crac) du Languedoc- Roussillon, sur la rade de Sète. Quatre expositions d’artistes invitées y sont consacrées à la représentation du corps et du modèle. On y trouve Sylvie Fanchon, Enna Chaton, Mïrka Lugosi, et surtout la peintre Nina Childress, à qui est dévolue une monographie de quatre salles éclatantes, regroupant une vingtaine d’œuvres récentes. Contemporaine, figurative et souvent dérivée d’œuvres existantes,read more
Créatrice à tiroirs, la peintre franco- américaine Nina Childress fut aussi une égérie punk et la seule femme d’un collectif d’artistes-activistes dans les années 80.
Comment se bâtit un mythe ? L’ascension est-elle toujours linéaire ? Lorsque l’on rencontre Nina Childress dans son atelier des Lilas, quelques jours après avoir visité son exposition au Crac
de Sète, ces questions nous précèdent. L’intéressée, pas dupe, sait bien que l’époque est au repêchage d’artistes injustement passés à la trappe.read more
De l’aventure de ses débuts aux côtés des frères Ripoulin dans les années 1980, Nina Childress aura conservé une habitude majeure : celle de n’en contracter aucune. Depuis trois décennies, sa pratique picturale embrasse tous les modes de représentation – abstraction ou hyperréalisme, objets du quotidien magnifiés ou autoportrait introspectif – et colonise tous les supports, semblant s’être donné pour principe une mise à nu méthodique de tout reste de révérence dont pourrait encore être affectée la vénérable peinture. Il n’est pas, à proprement parler, question de déconstruction. Car l’ancienne chanteuse du groupe post-punk Lucrate Milk procède par collage et réappropriation, préférant ajouter que retrancher, et ne disloque que pour mieux donner à voir.read more
(Ou comment j’ai focalisé sur un détail anatomique dans Les nudistes de Nina Childress),
The Swimmer
Elle était dans les nattes et elle est partie dans les colonnes vertébrales. Remarquez, de la natte à la colonne vertébrale, il y a une certaine continuité. Toutes les deux sont une succession d’éléments qui se répètent et forment une structure allongée. Sauf qu’on ne tresse pas les colonnes vertébrales et qu’il n’y a pas de hernie capillaire. Bref, Nina Childress peint des colonnes vertébrales depuis un petit moment après avoir peint des nattes pendant un bon moment. On pourrait dire les choses comme ça.read more
Tôt ou tard dans la vie se fait sentir le manque d’une culotte qui puisse être là juste pour nous consoler. Le potentiel réconfortant de la culotte n’est pas à sous-estimer. Surtout si l’on a été une petite fille dans les années 70 et qu’on a du coup probablement eu une mère qui fut à la queue leu leu : une jeune fille rangée dans les années 50, une trentenaire concernée dans les années 60, une quadragénaire émancipée dans les années 70, une quinquagénaire déterminée dans les années 80, une sexagénaire décomplexée dans les années 90, une septuagénaire régénérée dans les années 00 et une octogénaire à peine froissée dans les années 10.read more
Il en va de la natte comme de la frange : l’une et l’autre sont de bonnes affaires en matière de potentiel sémiologique. Il y a déjà un certain temps, Roland Barthes s’était penché sur la seconde (la frange) dans ses Mythologies pour analyser comment les studios hollywoodiens avaient su tirer tous les bénéfices de cette particularité capillaire dans les péplums des années 50/60. Un coup de ciseau bien ajusté vous transformait n’importe quel acteur transpirant les plaines du Texas en patricien romain tout ragaillardi par une séance dans les thermes. Marlon Brando, Tony Curtis, Rex Harrison, Martin Landau, James Mason, tous ont eu droit au front garni de bouclettes plus ou moins bien peignées pour exprimer leur romanité dans Cléopâtre, Spartacus et autre Jules César, aidés dans cette tâche il est vrai par la toge et les sandalettes, qui vous cassent aussi sec toute panoplie de cow-boy essayant sournoisement de s’imposer par persistance rétinienne dans l’œil des cinéphiles ayant trop consommé de westerns.read more
La figure de la Cantatrice fait partie de son répertoire. En 2009 au Mamco à Genève, elle consacre son exposition à deux figures féminines du XXème siècle, la soprano Marjorie Lawrence et la remarquable auteur du Deuxième sexe, Simone de Beauvoir. Nina Childress, joue aussi avec tous les archétypes féminins, et à même récemment repris L’enterrement à Ornans du célèbre peintre de L’origine du monde Gustave Courbet, pour remplacer tous les personnages par des filles nues peintes en vert aux accents fluorescents, entourées de cygnes. L’artiste s’autorise toutes les transgressions et avec une palette criarde, met la peinture sur scène.read more
Gwilherm Perthuis : Au printemps 2011, dans le cadre de l’exposition « Courbet contemporain », vous avez présenté au Musée des Beaux-arts de Dôle une grande composition inspirée d’Un Enterrement à Ornans (1849-1850). Le format et le décor sont respectés mais les personnages sont remplacés par des filles vertes nues. Vous attachez de l’importance à ce qui avait été reproché au tableau de Courbet : étrangeté, maladresse, trivialité, refus de la séduction… Pourriez-vous préciser les enjeux de cette peinture et sa place dans votre travail ?read more
Nous avons tous plus ou moins en mémoire ce tableau remarquable qu’est L’enterrement à Ornans de Courbet. Réalisé vers 1850, on y voit une « scène » à plusieurs genres se déployant en panoramique sur les quelques 6 m d’envergure qu’a la toile. A échelle humaine s’y côtoient donc le défunt, en bière et soutenu par quatre porteurs, le curé en grandes pompes, les sacristains et les bedeaux qui l’entourent, les enfants de chœur, le fossoyeur à moitié à genoux, le groupe d’hommes et à la droite celui des femmes, tous vêtus de deuil, et, un rien anachronique, deux « révolutionnaires » devant eux, que l’on reconnaît à leurs costumes « républicains », soit des guêtres et des bas. Bien sûr ce tableau n’est en rien un témoignage « direct » de la cérémonie qu’il relate ; c’est une pure composition, ordonnée et réalisée par l’artiste, qui a convié tous les « figurants » à venir poser sur le vif dans le grenier de la maison familiale qui lui servait d’atelier. Courbet se serait plaint des conditions exécrables dont il disposait pour travailler, peu d’espace, manque de lumière, faible hauteur sous le faîte de la ferme… Ceci peut en partie expliquer les disproportions des personnages représentés, les uns paraissant trop grands, les autres au contraire comme diminués en taille, et, dans l’ensemble, tous semblant être agglutinés d’une manière aussi improbable que physiquement possible. La raison de cette invraisemblance est à vrai dire assez simple à comprendre : il fallait que le tout « tienne » dans l’espace de la toile, comme s’il avait fallu à tout prix le compresser pour pouvoir le « cadrer ». C’est assez amusant de constater que les critiques plutôt acerbes auxquelles a eu droit ce tableau se soient systématiquement orientées vers l’insolence dramaturgique qu’il ose représenter, plutôt que sur ses incongruités techniques. Beaucoup n’ont pas supporté le « contenu » de la scène, car exposer ainsi une réunion de paysans en lieu et place d’une assemblée vénérable de nobles ou de savants, voire une honorable métaphore de héros triomphants, était un crime de lèse majesté. Plus qu’une injure aux canons et aux codes académiques, c’était le compte-rendu « réaliste » (sic) de l’affaire qui était inconvenant, et jamais le diction arguant de veiller à ne pas « mélanger les torchons et les serviettes » n’a eu plus de poids que dans les gémonies auxquelles ce tableau a été voué.read more
L’effet Sissi, commence avec Romy Schneider, pouponne et souriante : une princesse de conte de fée qui – en vrai – se suicidera. Elle est une icône du bonheur conjugal et royal, une égérie des animaux qui gambadent autour des lacs bavarois. De manière plus précise encore, Visconti l’a montrée solitaire, hiératique, en amazone sur un étalon noir, épiée par un Helmut Berger plus Ludwig que nature.
Il y a bien eu Ava Gardner dans Mayerling, en reine mère mûre et compréhensive, ainsi que d’autres incarnations comme ces inconnues qui chantent tous les étés en play-back dans une comédie musicale, mêlant chorégraphies et violoneux aux Wittelsbach.read more
Pour Nina Childress peindre est « une chose qui va de soi ». C’est aussi une affaire de famille qui lui permet, enfant, de s’exercer la main et le regard au contact d’un double héritage, antagoniste, celui de l’abstraction et du portrait réaliste. Au vu de l’impressionnant corpus de peintures réalisé depuis qu’elle est artiste, il apparaît évident qu’entre ces deux influences elle n’a pas souhaité prendre parti.
Dans son œuvre, les ruptures de style semblent se faire de manière programmatique. Des grisailles séduisantes et virtuoses côtoient des monochromes fluo stridents ; des aplats, cernés ou non de noir, font place à des rendus hyperréalistes, eux-mêmes précédés d’effets de flous qu’elle désigne par les néologismes Flounet ou Blurriness.read more
La galerie Iconoscope présente le travail de Nina Childress, artiste inspirée que l’on ne se lasse pas de suivre. Le titre de l’exposition (RVB) renvoie au format de codage des couleurs (rouge, vert, bleu), utilisé dans la vidéo, les écrans et les images numériques. Nina Childress poursuit son exploration des couleurs et des effets optiques. Ses toiles jouent ici sur la synthèse et les écarts de vision pour questionner les qualités et les fonctions de l’image.
Au-delà du phénomène perceptuel, la couleur est associée au souvenir, la princesse nous plonge dans un univers kitsch aussi réaliste qu’artificiel. Positionnement des couleurs décalées et esthétique vintage rappellent certains films technicolor ou en vision 3d. Les scènes d’intérieur ressemblent à des décors inspirés de magazines de décorations des années 50 bien que choisis en fonction d’un climat psychologique précis, favorable aux errances mentales. Sur fond d’imaginaire stéréotypé, les images dégagent un arrière-plan subjectif très personnel. L’utilisation de jus de peinture à l’huile lui permet de nuancer, de créer notamment des effets de vieillissement et des ambiances particulières. Les images-souvenirs font surface et s’accumulent comme autant de spectres à assembler pour tenter une difficile reconstruction. De ce monde enchanté, théâtre de ses rêves, se dégage une atmosphère angoissante, qui laisse sans voix à l’instar de cette diva en concert, dont sont uniquement diffusées les images.read more
« Lorsqu’on a reconnu l’impossibilité de saisir le caractère véritable des aspects de la nature par les moyens du peintre, lorsqu’on a aussi reconnu l’erreur de l’interprétation fantaisiste, on ne se trouve pas, comme on pourrait le croire, devant un vide béant… En principe, l’art de la peinture est d’articuler une proposition à la lecture de caractères graphiques, plastiques et d’états de la lumière et de la couleur combinés. L’indication du sujet, l’observation exprimée n’est pas proprement art ; elle le devient dans le revêtement subjectif, attribué généralement par l’artiste aux aspects de la nature.[1] » Kupka, 1921read more
Nina Childress aime les tableaux uniques et les polyptyques de grand format. Elle aime la complexité du figural et sa potentialité associative.
Il lui est arrivé de se complaire dans le ressassement sériel d’une forme de bonbon, de savon ou de boîte Tupperware, dans un esprit mécanique proche de Warhol.
Variées, multiples, ses peintures peuvent néanmoins se répartir dans deux catégories bien distinctes : celles qui forment une suite narrative et celles qui jouent sur la répétition d’un même motif.read more
Nina Childress persiste à interroger le cliché dans le sens photographique du terme, mais aussi la peinture en tant que cliché, où tout semble avoir déjà été peint, de toutes les manières possibles, et avoir déjà été récupéré, stylisé, épuisé dans le décor. Les stratégies qu’elle emploie contribuent à donner à ses tableaux la présence singulière et obsédante d’images déjà-vues, mais pas définitivement perdues dans les oubliettes de notre mémoire.
À l’origine de cette exposition, il y a la présence dans la collection du Frac Limousin d’une étonnante peinture de Nina Childress « Les Blondes I » (1997) acquise en 1998. Etonnante peinture que celle-ci : sur un format carré flotte un halo bleu clair traité à l’acrylique (comme le dit l’artiste, pour faire oublier les coins) sur lequel flottent à leur tour, tête-bêche, deux motifs de chevelure peints à l’huile où l’on perçoit clairement à la fois le défi que constituent ces motifs, non pas gestuels, mais ondulants, soyeux, et un véritable plaisir de peindre.
On pense, bien entendu, aux images publicitaires, incrustations télé, etc. et on a raison de s’y référer, car la source de cette image est bien là. Cependant, le message semble différent : il ne s’agit plus d’être attiré au point de devoir absolument acheter ce nouveau shampoing démêlant ou autre, mais de considérer attentivement, dans un temps tellement ralenti qu’il en devient immuable, les éléments constitutifs de notre fascination.read more
Yannick Milloux : « j’aimerai vous poser personnellement la question de l’apport de la photographie dans votre peinture contenu dans cette formule un peu lapidaire qu’on peut détailler ainsi : Comment peindre après Picabia, le peintre de tous les styles successifs, et après Richter, celui de plusieurs styles menés de front.
Si Picabia et Richter ne vous concernent en aucune façon, vous pouvez les remplacer par d’autre (Warhol, Magritte, etc…) à votre guise. »
Nina Childress : Comment peindre après Picabia et Richter ? Picabia copie des photos pour faire des tableaux impressionistes plus vite que les autres, Richter copie des photos pour échapper à l’art informel, Picabia copie des femmes nues car il les désire, Richter peint sa femme nue qui descend un escalier mais ne veut pas faire moderne comme Duchamp. Picabia ne dit pas qu’il copie des photos, Richter dit qu’il fait des photos.read more
La rencontre de deux artistes dans une exposition repose sur la capacité des œuvres à se réfléchir réciproquement : mais cela veut dire que les œuvres dialoguent entre elles dans la mesure où elles cherchent à réfléchir quelque chose hors d’elles, un monde qui leur soit commun. L’exercice commande l’hypothèse d’un troisième terme, inconnu, que la combinaison des deux autres (les oeuvres en présence) permet de viser, dans une réflexivité double.
Traditionnellement, on concevait parfois l’art comme un miroir : il se peut que cette réflexivité simple, frontale, soit devenue plus complexe avec les innombrables « réflecteurs » qui augmentent les points de vue possibles entre les réalités et les simulacres, les originaux et les copies, l’être et le semblant (plus retors encore que le « paraître »).
Les peintures de Nina Childress mettent volontiers en oeuvre l’agrandissement du motif, mais surtout une technique souple où le flouté et l’« approximation hyper-réaliste » jettent le regard dans une sorte de trouble devant ce qu’il voit. De même, les objets agrandis de Lilian Bourgeat participent d’une modification étrange des choses, de leur fonction, comme si ces choses conservaient leur usage habituel mais que leur destinataire était un Pantagruel du nouveau millénaire, nous obligeant alors à nous adapter à des dimensions nouvelles. Par ailleurs, ces deux artistes traitent de choses proches, quotidiennes, et y font passer une sorte d’énergie lumineuse, colorée, vive : si bien qu’au bout du compte, ils semblent soucieux l’un et l’autre, à travers leurs œuvres inquiètes mais joyeuses, de grandir le spectateur.
Le Frac Languedoc-Roussillon proposera aussi cette année de nombreuses occasions de se rincer l’œil: que doit-on attendre de l’art que cette salutaire gymnastique qui apprend à distinguer le réel de l’illusoire, les choses de leur ombre, les originaux des copies et les originaux des multiples simulacres qui encombrent nos vies de fantômes tangibles ? C’est que le semblant est lié à l’être comme la moutarde à la saucisse, on ne peut croquer l’une sans avaler l’autre !read more
La galerie Frontières présente la première exposition de Nina Childress uniquement composée de peintures « abstraites ». Si elle est surtout connue pour son travail réaliste, lié à l’objet ou à la photographie ( série Blurriness ), l’abstraction a toujours fait partie de ses recherches, venant en contrepoint souligner ou éclairer des questionnements formels divers.
Dès son exposition personnelle de 1987 Arts ménagers , elle présente une Petite théorie de la couleur en images auprès d’une Grande théorie de la couleur abstraite ainsi qu’un code barre de 2 m x 4 m, sorte d’hommage à Daniel Buren. L’ensemble rotatif montré ici reprends des motifs de paquets de lessive ainsi que des éléments de sa théorie de la couleur. La rotation des disques en bois, peints à l’acrylique, évoque le mouvement des machines à laver et des fours à micro-ondes tout en rejoignant les préoccupations et les méthodes des artistes cinétiques.read more
Pour « Recall », Nina Childress a conçu un dispositif constitué d’une surface d’exposition blanche, d’où un corpus de tableaux serait tombé. Anciens et récents mélangés, on y trouve des peintures hyperréalistes, abstraites ou encore pseudo expressionnistes. Ce mélange constitue un dialogue entre la peinture et les moyens d’impression et d’agrandissement.
Une courte séquence de musique punk se déclenche par surprise lorsqu’un spectateur s’approche très près du petit tableau « Scala ». L’extrait musical, associé à l’époque où Nina Childress a étudié à l’ENSAD, évoque une révolte contre les idées reçues.read more
…j’en avais vu bien d’autres, j’avais visité le monde des choses qui auraient pu être, et je n’arrivais pas à me les sortir de l’esprit. Et j’avais connu la beauté prisonnière au cœur de ce monde, la beauté perdue pour moi et pour nous tous, et j’en étais tombé amoureux.
Italo Calvino, Temps Zéro
Au tournant du millénaire, comment les occidentaux, et particulièrement ceux de la jeune génération, vivent, agissent et réagissent à leur temps, à l’ère de la standardisation omniprésente et du capitalisme omnipotent ? Si beaucoup peuvent sans doute être classés dans ce que Douglas Coupland nomme Génération X [1], ne voyant aucun futur dans le futur, écoulant le temps dans un univers calfeutré « microsofté », consommant « nourriture insipide » et jeux vidéo « ennuyeusement excitants », certains, heureusement, s’efforcent de résister à ce non-futur-comme-futur en repensant ou ré-imaginant les relations entre les humains et le monde, entre le corps et l’esprit, entre le public et le privé, entre la joie et l’anxiété…read more
Gris = Marron= Vermillon= Kaki. Quand Nina Childress vous expose sa théorie sur la couleur c’est pour expliquer qu’elle peint pour des gens qui ne comprennent rient à la peinture, comme les ménagères, les enfants ou les intellectuels. Vous le savez : ces gens-là sont bien plus difficiles à séduire que tel ou tel théoricien de l’art, pour qui il suffit de mettre en scène quelque habile supercherie, et le voir s’ébahir. C’est pourquoi Nina peint aussi bien, je veux dire également, des rayures verticales que des paysages de montagne ou des femmes nues. Brouiller les pistes, dit-elle. Comme pour commettre impunément le crime parfait. Le lecteur des pages-culture lève les yeux au ciel. L’inspecteur Colombo s’interroge : cette grande fresque à la gloire du code-barre au dos de ce catalogue, est-ce a) de l’art conceptuel, b) de l’hyperréalisme, c) de la peinture abstraite. Ready-made ? Bien davantage. « Un beau paquet de lessive vaut un tableau moche. Mais pas plus ». Nina Childress a dédié cette exposition à la galerie l’Aire du Verseau aux Arts-Ménagers, « un thème typiquement féminin ». Les frères Ripoulin sont contents, elle peint aussi bien qu’un homme.read more
Article inédit, signé TEENIE, à propos de l’expo dans le cadre « AUTREMENT », Espace Kiron, Paris, du 25 au 30 sept 1984
Les aléas du festival d’Autrement, ont placé à l’espace Kiron la peinture de Nina Childress dont l’esprit et les couleurs contrastent violemment avec les travaux de Paul Pack, Ph. Charpentier et Pierre Marie Ziegler, seuls Placid et Muzo entretiennent avec elle quelques affinités.
Sa peinture est à l’image de la musique de Lucrate Milk – dont elle était la chanteuse –, c’est-à-dire unique. Après de nombreux concerts, trois disques, et des éloges dans la presse anglaise, le groupe parisien le plus « arty » est maintenant dissous. Comme les toiles de Nina, leur musique est caractérisée par l’intervention, l’humour et une énergie formidable.read more